La royauté est le système ancestral que le colonisateur est venu trouver sur place dans les pays africains. Alors, pour bien assoir son hégémonie, la destruction de cette structure socio politique a donc été le premier chantier sur lequel il s’est engagé. Ainsi, très vite, les sociétés africaines ont été désorganisées et des rois autrefois déifiés de leur vivant surtout dans bon nombre de cultures béninoises et singulièrement dans l’ancien royaume du Danhomè où le monarque incarnait toutes les grandeurs, sont déportés et d’autres chassés de leurs palais comme de vulgaires individus.
Les symboles forts de nos civilisations ont été saccagés et d’autres pillés pour achalander les musées d’ailleurs. C’était la raison du plus fort qui a simplement emporté sur celle du plus »juste ». Par conséquent, face à l’atrocité de la force du colonisateur contre les rois qu’on croyait être les plus forts à l’époque et qui n’avaient plus autre choix que d’abdiquer de peur de voir eux et leurs peuples effacer de la surface du globe comme des insectes dans une campagne de désinfection ; les rois les moins armées ont usé de sagesse en s’éclipsant volontiers pour ne pas se voir écrasés par le rouleau compresseur déployé par la France sur les terroirs d’Afrique qui lui sont échus.
Mais bien que ces symboles forts de si riches civilisations ont été saccagés au nom d’une supposée mission civilisatrice, le sang royal n’a jamais cessé de couler dans les veines des dignes princes même loin des symboles physiques de leurs royaumes. Qui ne souvient pas de la noblesse avec laquelle le prince Wanilo, fils du roi Béhanzin se comportait au pays des blancs, bien qu’il s’est laissé »civilisé »? Ainsi, il y a des traits de caractère par lesquels, les princes d’Abomey sont identifiés même étant nés loin de leur origine géographique. Il y en est de même pour les princes Wasangari et autres vrais descendants d’une lignée royale. Ce qui atteste qu’en Afrique, la royauté au-delà de l’organisation et des accoutrements, est un ensemble de valeurs immuables dont la pratique multiséculaire a fait encrer dans le sang des fils et filles de ces lignées royales de génération en génération.
Ainsi, le sang royal ne se vend pas ! Contrairement à ce qui se voit aujourd’hui où des trônes se créent partout avec la force de l’argent par des individus qui ne recherchent que l’honneur du titre. Quand bien même ces derniers n’ont rien de royal dans leur sang, ils se font appeler rois avec des attributs extérieurs, fruits de leur fantasme pour assouvir leur soif d’honneur. Ainsi, à force de vouloir s’acheter le sang royal, le titre de roi est galvaudé et profané de sorte à inviter le pouvoir politique moderne dans le débat. D’où cette fameuse loi récemment votée à l’Assemblée nationale du Bénin et qui fait grincer les dents dans bon nombre de palais.
Sinon, quoi qu’il advienne, le vrai sang royal continue de couler dans des veines et se démarque sur le terrain de tout autre teinté d’attributs royaux par imitation ou par fantaisie.
Edouard ADODE