La chose la mieux partagée en Afrique est la religion. L’africain est naturellement un homme de foi. D’une manière ou d’une autre, chaque africain croit en quelque chose au-delà de tout ce qui est physique. Ce qui se traduit d’ailleurs par la multiplicité des divinités par ici. Le Bénin est souvent présenté comme cette Afrique en miniature fertile à toutes les croyances. Ainsi, le Bénin affiche une tolérance religieuse légendaire, gage de la cohabitation pacifique entre des croyances qui s’excluent et qui parfois se combattent avec une férocité au-delà de tout. Sous nos cieux, la diversité des croyances déchire bien de familles débouchant sur des luttes féroces.
Il n’est donc pas un secret pour les esprits avertis que derrière la tolérance religieuse apparente qui fait la fierté du Bénin, se cache un volcan dormant qui peut se réveiller à tout moment. D’ailleurs, le réveil de ce volcan semble être acté par la querelle des dieux qui prend de plus en plus d’intensité dans la cité. Avec la révolution notée au niveau des religions que nous appelons endogènes, des dignitaires marquent de plus en plus les esprits par des déclarations fortes pour prendre la défense de leurs religions diabolisées par les autres. Ils s’inscrivent dans une dynamique unitaire visant à passer des querelles des dieux qui ont longtemps existée entre les couvents et qui donnaient lieu à des affrontements mystiques les plus féroces parfois fatales à leurs adeptes. Ainsi, comme dans une croisade qui ne dit pas son nom, le vodoun est à la reconquête de son territoire.
A travers une déclaration publique faite le 22 juin dernier à Cotonou, les adeptes des cultes vodoun n’ont pas caché leur colère contre certains propos qu’ils jugent de dégradants pour leur foi et venant des autres, c’est-à-dire ceux des religions dites importées. Bien plus que l’expression d’une indignation, cette sortie de la communauté vodoun traduit une partie de la chaleur que couvre la tolérance de surface que nous célébrons souvent à travers des rencontres et des discours hypocrites au nom du dialogue inter religieux. A l’allure où va la querelle entre les religions au Bénin, c’est à croire que les dieux sont devenus impuissants pour se défendre et qu’il faille que leurs adeptes prennent leur défense. Ainsi, derrière les larges sourires œcuméniques qui s’affichent lors des rencontres forcées parfois par des politiques par souci de la préservation du vivre ensemble, se cachent un dédain et une lutte ruineuse qui se transportent très vite dans les actes et dans les propos.
Par conséquent, si chacun ne retrouve pas en lui-même la force de l’acceptation de la différence qui fait la beauté de l’univers en usant d’un regard d’amour à l’égard de l’autre, cette querelle des dieux pourrait être l’arme fatale et compromettante pour la paix au moment où on s’y attendrait le moins.
Edouard ADODE