Il n’est un secret pour personne que la grande bataille attendue pour la présidentielle de 2026 au Bénin, est celle entre le candidat de la mouvance présidentielle et celui du parti de l’opposition Les Démocrates. Ce qui nécessite une préparation sérieuse de part et d’autre, et surtout dans un esprit d’unité. Mais du côté de l’opposition, le parti Les Démocrates de Boni Yayi semble se laisser distraire au point de s’épuiser même avant la bataille par une peur vaine autour de l’auto parrainage alors que la question est vidée depuis longtemps. Tout porte à croire qu’un démon de la division tape à la porte de cette formation politique sur qui les yeux sont plus rivés.
À quelques mois d’une présidentielle décisive, Les Démocrates semblent avoir identifié leur principal adversaire. Mais ce n’est ni Patrice Talon, ni le camp présidentiel, ni même les conditions rugueuses d’une compétition électorale sous haute tension. Leur véritable ennemi, c’est… eux-mêmes. À force de ressasser un débat creux sur l’auto-parrainage, le parti donne l’image d’une formation qui s’épuise dans des querelles internes alors que l’heure devrait être à la préparation d’un combat historique.
Depuis plusieurs semaines, les réseaux sociaux et certains cercles politiques bruissent d’une polémique absurde, un élu pourrait-il parrainer le duo présidentiel dont il fait partie ? Des cadres des Démocrates agitent la menace d’une invalidation de candidature pour nourrir cette thèse. Pourtant, cette question a déjà été réglée. En 2021, la Cour constitutionnelle a tranché, le parrainage est un acte de volonté libre, laissé à l’appréciation de l’élu qui en dispose. Aucun texte n’interdit à un député de parrainer son propre duo. Mieux encore, le Directeur général des élections, Boucary Abou Soulé Adam, a rappelé avec bon sens le 20 août dernier : « Si vous votez pour vous-même, pourquoi vous ne pouvez pas vous parrainer ? » Une formule limpide, qui devrait clore le débat à jamais.
Et si l’on veut pousser la logique des partisans de cette polémique, alors il faut tirer toutes les conséquences, l’élection de 2021 aurait été illégale, puisque Mariam Chabi Talata, alors députée et vice-présidente de l’Assemblée nationale, s’était bel et bien auto-parrainée avant de devenir colistière de Talon. Faut-il donc conclure que tout le second mandat de Patrice Talon est nul et non avenu ? Bien sûr que non. Remettre ce sujet sur la table aujourd’hui, c’est comme demander une invalidation rétroactive du mandat présidentiel en cours, une absurdité totale, une fuite en avant qui frôle le ridicule.
Derrière le vernis juridique, il y a une réalité moins avouable, cette querelle n’est rien d’autre qu’un instrument de lutte interne. Certains responsables des Démocrates cherchent à neutraliser les députés détenteurs de parrainages pour mieux redistribuer les cartes et imposer leurs propres ambitions. Autrement dit, il ne s’agit pas de droit, mais de positionnement. C’est une guerre sourde pour le contrôle du parti, déguisée en débat institutionnel. Et c’est précisément ce qui fragilise Ld, au lieu de se tourner vers l’électorat, le parti se déchire dans ses propres rangs, préférant les règlements de comptes aux stratégies de conquête du pouvoir.
Pourtant, l’opinion attend autre chose d’une grande formation d’opposition. Les Béninois veulent entendre parler d’emploi pour la jeunesse, d’éducation de qualité, d’un système de santé digne, d’une souveraineté économique à défendre. Ils espèrent que Les Démocrates formuleront enfin un projet crédible, capable d’incarner l’alternance et de défier le camp présidentiel sur le terrain des idées. Mais à la place, le parti s’enferme dans une querelle technique, incompréhensible pour le citoyen moyen, et qui donne l’image d’une opposition plus préoccupée par ses rivalités internes que par le sort du pays.
Le risque est clair, à force de se saborder, Les Démocrates vont arriver à la présidentielle de 2026 divisés, affaiblis et discrédités. Or la politique n’est pas un suicide collectif. Un parti qui se bat contre lui-même a déjà perdu avant d’avoir affronté son adversaire. La stratégie actuelle revient à se tirer une balle dans le pied en pleine course. Les électeurs, eux, observent. Et rien n’est plus cruel qu’un peuple qui détourne le regard d’une opposition jugée incapable de se hisser à la hauteur de ses responsabilités.
L’auto-parrainage n’est pas un problème. La loi l’autorise, la Cour l’a confirmé, l’histoire l’a déjà illustré. S’acharner sur ce sujet, c’est alimenter une polémique stérile qui n’a qu’un seul effet concret, diviser et fragiliser l’opposition. À l’heure où le Bénin a besoin d’un vrai débat sur son avenir, Les Démocrates donnent le spectacle navrant d’un parti qui préfère se saborder seul.
La Rédaction